Une réflexion pour les architectes et les urbanistes en matière de gestion durable

Charleroi, une ville avec un lourd passé industriel (aciéries, verreries, charbonnages), structurée par et autour de ses industries, se relève grâce aux nouvelles technologies et aux sociétés qui sont prêtes à y investir. Mais cette ville, comme beaucoup de grandes villes européennes, possède encore beaucoup de friches, de chancres industriels et d’industries dont l’esthétique est subjective.

Pourtant, des solutions vertes et économiques existent pour redynamiser et embellir des chancres urbains par une valorisation verte de ces espaces.

Observez l’évolution naturelle d’un ancien site industriel avec des ruines (p.ex : une dalle en béton d’un ancien centre de tri), les lichens arrivent en végétaux colonisateurs, puis les mousses, les graminées, les bouleaux et enfin les autres essences d’arbres. Parallèlement à cette colonisation, un substrat (sol) apparaît et s’améliore au fil des saisons.

Cette évolution naturelle évoque une solution de transition et un espoir pour les chancres urbains : la foresterie urbaine. Dans le cas d’une cité industrielle, la foresterie urbaine doit être approchée comme un boisement de type forestier (peu onéreux) dont le but est d’arriver directement à la phase finale de colonisation par les plantes ligneuses car l’objectif est d’obtenir le plus rapidement  possible  un aspect boisé.

La foresterie urbaine doit être considérée comme une amélioration transitoire de l’espace. Celle-ci mènera à des changements ultérieurs : destination de zone au plan de secteur ou amélioration de l’esthétique des lieux pour recevoir dans le futur de nouvelles entreprises.

Les avantages de la foresterie urbaine pour Charleroi et d’autres anciennes cités industrielles sont nombreux :

  • amélioration du cadre de vie des riverains par une verdurisation des chancres urbains ;
  • amélioration de l’intégration des industries et du bâti ;
  • création de paysages agréables ;
  • création de zone tampon ;
  • développement de la biodiversité locale ;
  • stockage du carbone ;
  • filtration de l’air et canalisation des vents ;
  • filtration des eaux de pluies ;
  • etc.

Du point de vue économique, la foresterie urbaine n’est pas onéreuse ! Car c’est un simple boisement de type forestier avec coût de création faible et d’entretien encore plus faible. Et pour des entreprises situées dans les nouvelles zones industrielles, il est intéressant de savoir qu’un boisement libre est nettement moins coûteux qu’une pelouse et qu’il favorisera la biodiversité locale s’il est composé d’essences mellifères.

Dans une ville comme Charleroi, par sa structure, les urbanistes doivent envisager des transitions pour prévoir le lendemain ! La foresterie urbaine est la solution pour nos espaces difficiles ou à l’abandon.

Voici un exemple plus concret de foresterie urbaine : imaginez un terrain vague résultant d’une ancienne industrie. Un urbaniste propose au pouvoir local la création d’une zone d’habitat. Mais pour diverses raisons, il n’est pas envisageable de le faire rapidement ! A travers la foresterie urbaine, une solution se dégage permettant d’imaginer des axes routiers qui seront boisés avec des essences pouvant constituer des drèves, des alignements structurants, des arbres isolés et remplir le reste avec des arbustes florifères. De cette manière, 3 à 5 ans après, le terrain est une jeune plantation fleurie et plus une friche ; 10 à 15 ans plus tard, c’est un bois ! Enfin, si le quartier se réalise, il y a déjà une structure verte (arbres isolés, drèves, alignements…) et les voisins auront eu le bénéfice de ne pas vivre auprès d’une friche !

La réflexion est lancée aux concepteurs de projets : la foresterie urbaine est une conception envisageant des transitions pour des projets à long terme qui se réaliseront ou pas ! Mais qui a le mérite d’au minimum valoriser nos villes en y introduisant la nature.

Les paysages industriels ne sont pas des créations d’architecte-paysagiste, ce sont des créations façonnées uniquement par nos anciennes activités économiques et sur lesquelles la nature a simplement repris ses droits. Ce dynamisme est la preuve que nos paysages évoluent et qu’ils sont en mouvement.

La foresterie urbaine pensée vers demain est probablement une solution pour embellir nos villes en intégrant des espaces différents dans une trame verte harmonieuse. Et un moyen aisé pour que les PME améliorent leurs abords.

article de Bernard Blareau